Olivier Piazza (Photo © Pierre-Henri Badel)

Le sujet du message dispensé par Olivier Piazza, co-directeur des D. U. Intelligence Collective, Executive Coaching & Management à l’Université de Cergy Pontoise lors de la dernière conférence du troisième Forum Management Montreux qui s’est tenu le 26 septembre 2019 abordait la question très controversée de la contribution de l’intelligence collective à la disruption des organisations.

Quand on part à la recherche des causes de l’évolution des recherches en matière d’intelligence collective, Olivier Piazza ne peut s’empêcher de citer Franck L. Ward qui, en 1906, affirmait que « La mesure avec laquelle la société évolue dépend de son intelligence collective. C’est à la société ce que la puissance du cerveau est à l’individu. » Pour le chercheur français, La première disruption est de nature ontologique, à savoir qu’elle s’interroge sur la signification de l’être. Selon lui, la première de ces disruptions ontologiques correspond aux systèmes complexes adaptatifs. Il cite pour illustrer ses propos ceux de Francis Heylighen pour qui « l’émergence de l’intelligence collective est intrinsèquement un processus d’auto-organisation défini comme la création spontanée d’un pattern global cohérent à partir d’interactions locales. »

Un minimum d’organisation est indispensable

Pour lui, les systèmes complexes adaptatifs impliquent une synchronisation décentralisée, auto-organisée, adaptive, émergente et hétérarchique. Et de citer l’exemple des arbres que l’on croît figés dans leur évolution, mais qui, en réalité, interagissent par leurs racines comme par osmose au travers du sol qui les laissent évoluer à leur guise et se maintiennent debout quelque soit la nature qui les abrite. « On ne peut pas faire de l’intelligence collective sans auto-organisation », souligne Olivier Plazza. « On a tendance à opposer le chao à l’ordre. » Cela dérange de ne pas vouloir tout maîtriser parfaitement.

Des systèmes qui tirent leurs racines dans une antique coutume helvétique

La deuxième disruption ontologique fait référence à la notion de gouvernance en commun. Un principe déjà mis en œuvre en Suisse avec l’exploitation des bisses destinée à irriguer les champs. Ce mode de gestion de l’eau remonte au début du 11ème siècle. On recense alors cinq types de propriétés qui cohabitent dans ces communs. L’une des règles applique était qu’aucun citoyen ne pouvait envoyer plus de vaches dans les alpages qu’il pouvait nourrir pendant l’hiver. « Le commun est à penser comme co-activité (…) et non comme co-appartenance, co-propriété ou co-possession » peut-on lire dans à ce sujet dans l’ouvrage Commun – Essai sur la révolution du XXe siècle de Pierre Dardot et Christian Laval. Un système qui était organisé sur les principes de l’auto-gouvernance, du suivi des engagements et de sanctions graduées.

Quand l’intelligence collective explose

Le troisième volet de cette disruption ontologique est caractérisé par le principe d’auto-détermination dont les ingrédients passent du mal être à l’épanouissement en appliquant les besoins de l’autonomie, de l’affiliation et de la compétence. Avec comme conséquences que quand les situations nourrissent ces trois besoins, les personnes fleurissent et mobilisent des comportements pro sociaux. Mais lorsque les situations sont indifférentes ou antagonistes à nos besoins, les personnes souffrent et tendent à développer des comportements antisociaux.

Quant au quatrième volet de cette disruption ontologique, il passe par le conciliabule, admet en conclusion Olivier Plazza. « On distingue dans ce domaine trois types de dialogues, le délibératif, le réflexif et génératif. »

© Pierre-Henri Badel