Travail et bien-être La société change. Le système économique aussi. La vie dans une entreprise évolue et des nouveaux codes se mettent en place. Cela implique forcément des évolutions dans la façon de diriger une entreprise. Une thématique au cœur du premier Forum Management Montreux, qui s’est tenu le 8 juin au Royal Plaza, où plusieurs poids lourds de l’économie nationale ont dévoilé leurs secrets d’une bonne gouvernance. Objectif de ces assises: connaître les nouvelles approches de management et identifier leur impact sur la performance, l’économie et le bien-être des employés. Parmi les pistes avancées pour la gestion du futur, miser sur la formation des cadres, encourager et faciliter le dialogue entre eux, créer un environnement de travail plus ouvert, transparent et flexible afin d’offrir aux employés davantage de liberté et d’autonomie, gages de bien-être, donc de productivité.

Des pistes pour la gouvernance du futur

Sandra Giampetruzzi

La donne économique à l’échelle globale a énormément changé durant ces dernières décennies: expansion de la mondialisation, compétition plus féroce, technologies montant en puissance, crises financières successives et chômage persistant. Ces éléments provoquent au sein de la société et dans l’entreprise incertitude, stress et changements profonds affectant les relations entre employeurs et employés. Il est donc grand temps de se poser des questions fondamentales sur l’avenir du travail et du management. «J’ai formé de nombreux cadres et je me suis rendu compte qu’il y avait des problèmes, à commencer par la nomination de ces derniers, précise Marcel Goldschmid, ancien professeur à l’EPFL en psychologie du management, consultant indépendant et président du premier Forum Management Montreux, qui avait lieu le 8 juin au Royal Plaza. Sept entreprises y ont pris part, dont des poids lourds de l’économie nationale, qui dévoilaient à tour de rôle leurs secrets d’une bonne gouvernance (voir encadré). «Souvent, le manager est quelqu’un qu’on choisit par rapport à ses compétences techniques et non pas pour ses compétences managériales, observe Marcel Goldschmid. Pourtant, diriger est un autre métier que celui de vendeur, sommelier ou même journaliste. Savoir diriger une équipe, coacher, parfois aussi licencier, discuter avec la direction, gérer les conflits, tout cela nécessite une formation adéquate. Malheureusement, la plupart du temps, cette formation est lacunaire. La personne, catapultée au titre de manager, n’y est souvent pas préparée».

Selon une étude menée par Gallup dans 140 pays avec plus de 2,5 mios de sujets, seuls deux managers sur dix sont aptes à faire ce métier convenablement. C’est souvent un manque de relation entre ce dernier et les employés qui est pointé du doigt. «Le manager doit être à l’écoute de ses collaborateurs. Dans l’idéal, il ne devrait pas en avoir plus de dix sous sa responsabilité pour être à leur écoute et les rencontrer régulièrement», estime le consultant.

Donner du sens au travail

«Globalement, le management a peu évolué face à tous ces changements, reconnaît Marcel Goldschmid. Dans beaucoup d’entreprises, les hiérarchies sont rigides et l’approche de type «commande et contrôle» prévaut encore. Mais il est réjouissant de constater que de plus en plus d’organisations commencent à repenser et à réinventer leur management, notamment par rapport à leur gestion du personnel.» Ces entreprises expérimentent et explorent ainsi de nouvelles stratégies mieux adaptées aux attentes des nouvelles générations d’employés. Elles mettent en place un environnement de travail plus ouvert, transparent et flexible où les employés jouissent de beaucoup plus de liberté et d’autonomie. «De nombreuses études ont clairement démontré que productivité et bien-être ne sont pas incompatibles ni opposés, mais bien au contraire intimement liés, confirme le consultant. Une culture d’entreprise qui favorise la collaboration, la prise d’initiatives, le sens et le plaisir au travail, ainsi que l’intelligence collective, améliore non seulement l’engagement des employés et l’ambiance au travail, mais renforce aussi la performance des salariés et augmente les résultats financiers de l’entreprise».

L’entreprise Google, par exemple, est précurseur dans le domaine. Elle laisse à ses collaborateurs 20% de leur temps de travail pour approfondir un sujet de leur choix. Et c’est précisément dans ces projets-là que Google fait les plus grandes avancées. Trouver avec le collaborateur le sens du travail, le féliciter, l’écouter, lui faire confiance, notamment dans son aménagement du temps de travail sont donc les clés du succès pour une entreprise. «Lorsqu’on lui fait confiance, il se responsabilise davantage. Il n’en profite pas pour ne rien faire ou en faire moins. Ça va jusqu’à son lieu de travail. À lui de décider s’il sera plus productif à travailler une fois par semaine à la maison, dans un parc ou au bureau», précise Caroline Goldschmid, responsable communication au Forum Management Montreux. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a aucune règle. Un minimum de présence au bureau doit être posé et le reste du temps est au choix du collaborateur.

Concilier productivité et bien-être

En plus de l’autonomie et de la flexibilité, d’autres éléments viennent améliorer le bien-être au travail. L’ergonomie, les relations avec le supérieur et avec les collègues, la communication, à savoir ce qu’on attend de l’employé, la santé par le biais d’un service de massage, mais aussi la mise à disposition d’une crèche, d’un service de conciergerie, sont autant d’éléments qui participent au bien-être dans l’entreprise. «Pour moi, le plus important est le sens du travail et les relations. C’est quelque chose qui se construit. Le salarié a aussi son rôle à jouer. C’est du donnant-donnant. Il a tout intérêt à s’investir, car il y aura un retour. Si l’entreprise va bien, il aura du travail. L’objectif est donc de trouver la manière de réconcilier productivité et bien-être», affirme Marcel Goldschmid.

Et le bien-être ne passe pas forcément par une augmentation de salaire. Un collaborateur qui se sent bien au travail sera plus productif et moins absent. Maladie, absentéisme, burn out, tout cela a un coût pour l’entreprise. On estime, par exemple, que 30% des personnes font un burn out lors de leur parcours professionnel. Un burn out qui peut durer de quelques mois à des années pour certains. L’entreprise doit donc impérativement penser à long terme et non à court terme.

«Toutes les entreprises invitées au forum sont des sociétés qui ont pris conscience de l’importance du bien-être de leurs collaborateurs et qui ont déjà mis en place un certain nombre de mesures allant dans ce sens», souligne sa porte-parole. Elles ont compris l’importance d’un partenariat entre l’entreprise et l’employé. Ce premier rendez-vous des entreprises devrait se prolonger par d’autres rencontres portant sur des problématiques différentes. Dont le rôle des femmes, car plus de 70% d’entre elles travaillent aujourd’hui, la digitalisation de l’entreprise ou comment choisir le bon manager.

http://www.leregional.ch/N98478/des-pistes-pour-la-gouvernance-du-futur.html